43

 

  II baisse le levier de son appareil, l’image de Pitt s’estompe et disparaît.

  Le soleil allait plonger derrière les montagnes lorsque Maxine Raferty aperçoit au-dessus de sa corde à linge Pitt qui approche par le sentier. Elle poursuit sa tâche et suspend la dernière chemise de son mari avant de saluer le visiteur de la main.

— Monsieur Pitt, c’est un plaisir de vous revoir.

— Bonsoir, madame Raferty.

— Loren est avec vous au chalet ?

— Non, elle a dû rester à Washington, répond Pitt en regardant autour de lui. Lee est là ?

— Il est à l’intérieur, en train de réparer l’évier.

  Une brise fraîche descend des cimes, et Maxine s’étonne que Pitt porte son blouson sur son avant-bras droit.

— Entrez donc, je vous en prie.

  Lee Raferty est assis à la table de la cuisine, il lime un morceau de tuyau de plomb et lève les yeux à l’entrée de Pitt.

— Monsieur Pitt ! Hé, asseyez-vous, vous tombez bien. J’allais déboucher une bouteille de ma réserve personnelle de raisin pressé.

— Vous faites donc du vin et de la bière ? demande Pitt en prenant une chaise.

— Il faut savoir tout faire ici dans la montagne, répond Lee en souriant et pointant son cigare sur le tuyau. Regardez ça, par exemple, ça coûterait une fortune de faire venir un plombier de Leadville. C’est moins cher de l’arranger soi-même. Un joint qui fuyait. Un gosse réparerait ça les yeux fermés.

  Raferty pose le tuyau rouillé sur un journal, se lève pour prendre dans un placard deux verres et une cruche de grès.

— Il faut que je vous parle, annonce Pitt.

— Avec plaisir. (Lee emplit les deux verres à ras bord.) Hé ! qu’est-ce que vous dites de tout ce remue-ménage là-bas, au lac ? J’ai entendu dire qu’ils avaient retrouvé un vieil avion. Ce serait pas celui dont vous parliez ?

— Exactement, répond Pitt, en buvant son verre qu’il tient de la main gauche. (Il est agréablement surpris de trouver le vin bon.) C’est une des raisons qui m’amènent ici. J’espérais aussi que vous pourriez, par ailleurs, m’expliquer pourquoi vous avez tué Charlie Smith.

  Lee Raferty relève légèrement un sourcil grisonnant : c’est sa seule réaction.

— Moi… assassiner ce vieux Charlie ? De quoi, diable ! parlez-vous-là ?

— D’un différend entre associés qui croyaient avoir découvert un magot au fond d’un lac de montagne.

  Le vieillard fixe Pitt et penche la tête.

— Vous parlez comme quelqu’un qui a perdu la boule.

— Vous n’auriez jamais imaginé qu’un étranger viendrait jusque chez vous pour parler d’un avion disparu ; vous aviez déjà fait une erreur en ne vous débarrassant pas du train de l’appareil et du réservoir d’oxygène. Je dois rendre hommage à vos talents de comédiens : j’ai marché comme un touriste lorsque vous m’avez joué votre scène de braves culs-terreux. Dès que j’ai tourné les talons, vous ne m’avez plus quitté de l’œil, et, en me voyant plonger dans le lac, vous étiez sûr que j’allais découvrir l’avion et le squelette de Charlie. C’est à ce moment-là que vous avez commis la faute irrémédiable : saisi par la panique, vous avez enlevé le squelette pour aller sans aucun doute l’enterrer quelque part au fin fond de la montagne. Si, au contraire, vous l’aviez laissé où il était, le shérif aurait eu bien du mal à vous impliquer dans un meurtre datant de plus de trois ans.

— Allez donc essayer de prouver quoi que ce soit sans cadavre, dit Lee en rallumant calmement son bout de cigare.

— Ce ne serait pas tellement difficile devant un tribunal, lui répond Pitt avec autant de calme. Je sais : innocent jusqu’à preuve du contraire ; mais votre scénario est un classique passé de mode. Voyons d’abord le titre : il tue son voisin par intérêt. Et passons au premier chapitre où un vieil inventeur excentrique appelé Charlie Smith expérimente sa dernière trouvaille : une canne à lancer automatique. Il lance et relance lorsque, tout à coup, l’hameçon plonge profondément et accroche quelque chose. Charlie est un pêcheur éprouvé, il pense être pris dans un arbre englouti, et il travaille adroitement du moulinet jusqu’à ce que l’obstacle cède, mais il sent qu’il a attrapé quelque chose. En effet, lorsque l’hameçon refait surface, la chose apparaît : c’est un réservoir d’oxygène d’avion. Rongées par des années d’immersion, ses fixations ont cédé, et les tractions exercées par Charlie ont suffi à arracher le réservoir et à le ramener à la surface.

  « La procédure normale eût consisté à prévenir le shérif. Malheureusement pour lui, Charlie est curieux. Il tient absolument à vérifier qu’il y a bien un avion au fond du lac ; aussi bricole-t-il un cordage et un grappin et se met-il à draguer. A un passage, il a dû accrocher et ramener le train avant endommagé qui a dû s’arracher de son logement. Ses prévisions se vérifiant, Charlie se laisse gagner par la cupidité, et il est persuadé d’avoir trouvé un trésor. Et, donc, au lieu d’agir en honnête citoyen et de signaler sa découverte, il s’en va tout droit chez Lee Raferty.

— Pourquoi Charlie serait-il venu me voir ?

— Un retraité de la Marine, un plongeur de fond : vous étiez faits pour vous entendre. Je suis prêt à parier que le matériel de plongée et le compresseur pneumatique que vous avez agencés tous les deux sont encore dans votre garage en ce moment même. Une plongée d’une quarantaine de mètres n’est qu’un jeu d’enfant pour un homme de votre expérience et muni d’un casque de plongée. L’étrange chargement contenu dans l’avion a excité votre imagination. Qu’espériez-vous trouver à l’intérieur de ces canisters ? De vieilles bombes atomiques peut-être ? Je vois d’ici le travail de Romain qu’ont dû accomplir deux hommes frisant les soixante-dix ans pour plonger dans l’eau glaciale, arracher des charges d’une tonne aux profondeurs et les remonter à terre. J’admire votre cœur à l’ouvrage. Et j’espère être seulement à moitié en aussi bonne forme physique quand j’aurai votre âge.

— Ce n’était pas tellement dur, sourit Lee qui ne paraît pas redouter Pitt le moins du monde. Lorsque Charlie a pu au moyen d’une légère charge explosive, agrandir la déchirure du fuselage, il était simple pour moi de fixer un câble à un étui et, pour Charlie, de le remorquer à terre avec notre voiture à quatre roues motrices.

— Qui veut la fin… dit Pitt. Et ensuite, Lee ? Une fois le canister ramené à terre, il était clair pour un ancien marin et un ancien spécialiste des explosifs que vous vous trouviez en présence d’un trésor qui aurait réchauffé le cœur d’un amiral de l’ancienne génération. Mais à quoi cela pouvait-il servir et quelle en était la valeur aujourd’hui ? Où pouvait-on écouler un projectile de marine déclassé, sinon aux surplus ?

  Lee Raferty se remet paisiblement à ébarber l’orifice de son tuyau.

— Déduction joliment habile, monsieur Pitt, je l’admets. Ce n’est pas du cent pour cent exact, sachez-le, mais vous n’êtes pas loin du compte. Cela dit, vous sous-estimez deux vieux renards retraités de la Marine. Bon sang, nous étions sûrs au premier coup d’œil que les trucs contenus dans les canisters n’étaient pas des obus de rupture. Il n’a guère fallu plus de dix minutes à ce vieux Charlie pour découvrir que c’étaient des obus à gaz.

  Pitt est stupéfait. Auprès de ces deux vieillards, il a l’impression qu’ils sont tous des gosses.

— Comment a-t-il trouvé ça ? interroge-t-il sèchement.

— L’extérieur était bien celui d’un projectile lourd ordinaire de marine, mais il était monté comme une fusée éclairante. Vous connaissez ça : à une altitude déterminée, un parachute s’ouvre et une charge allume une masse de phosphore. Seulement, notre monstre à nous était agencé pour libérer un bouquet de petites bombes chargées d’un gaz mortel.

— C’est simplement en les regardant que Charlie a découvert qu’ils contenaient du gaz ?

— Il a repéré le couvercle du logement du parachute. Ça lui a fourni un premier indice. Il est revenu devant, il a démonté l’ogive, le détonateur, et il a jeté un coup d’œil à l’intérieur.

— Grand Dieu ! murmure Pitt prêt à désespérer. Charlie a ouvert l’ogive ?

— Et après ? Ce n’était pas grand-chose pour lui, un spécialiste des explosifs.

  Pitt respire à fond et pose la question capitale.

— Qu’avez-vous fait de ces canisters ?

— Eh bien, comme on dit : ce qui tombe dans le fossé est pour le soldat.

— Où sont-elles passées ?

— Nous les avons vendues.

— Quoi ? s’étrangle Pitt. Et à qui ?

— A la Phalanx Arms Corporation de Newark, dans le New Jersey. Ils achètent et vendent des armes sur le marché international. Je me suis mis en relations avec leur vice-président, une espèce de toqué qui ressemble davantage à un quincaillier qu’à un marchand de mort. Il s’appelle Orville Mapes. Il est venu ici par avion, il a examiné le projectile, et il nous a offert 5 000 dollars la pièce pour ceux que nous pourrions expédier à ses entrepôts. Et il n’a pas demandé un brin d’explication.

— Je devine le reste, dit Pitt. Charlie s’est rendu compte que si ces obus étaient utilisés il serait responsable de milliers, sinon de centaines de milliers de morts. Vous avez été moins sensible, Lee. L’argent vous impose davantage qu’une bonne conscience. Vous vous êtes disputés puis battus, et Charlie a eu le dessous. Vous avez caché son corps dans l’avion englouti. Puis vous avez fait exploser quelques bâtons de dynamite, jeté une botte et un pouce dans les débris, et vous avez pleuré comme une fontaine à son enterrement.

  Raferty ne réagit pas aux accusations de Pitt. Son regard débonnaire n’a jamais quitté le tube de plomb. Il continue d’en limer lentement, placidement les orifices. Il est bien trop décontracté, songe Pitt. Raferty ne se comporte pas comme un homme qui va devoir rendre compte d’un assassinat. Il n’a pas du tout l’air d’un type acculé.

— Dommage que Charlie n’ait pas vu les choses comme moi,  dit-il en haussant tristement les épaules. A l’inverse de ce que vous pensez, monsieur Pitt, je ne suis pas cupide. Je n’ai pas essayé de vendre tous les projectiles d’un seul coup. Si vous préférez, je les considérais plutôt comme une sorte de compte en banque. Quand Maxine et moi avions besoin de quelques dollars, je faisais une sorte de prélèvement sur mon compte, si l’on peut dire, et j’appelais Mapes. Il envoyait un camion prendre livraison de la marchandise et il payait comptant, en liquide. Une affaire sans bavures et non imposable.

— J’aimerais que vous me disiez comment vous avez tué Charlie Smith.

— Désolé de vous décevoir, monsieur Pitt, mais je n’ai pas dans la peau ce qu’il faut pour prendre la vie d’un homme. (Raferty se penche, et un rictus semble se dessiner sur son visage ridé.) La main qui agit, c’est celle de Maxine. C’est elle qui s’est chargée de le tuer. Elle a mis une balle en plein cœur du vieux Charlie comme vous diriez bonjour.

— Maxine ?

  Le choc intérieur que ressent Pitt ne vient pas tellement de la surprise que du fait qu’il comprend soudain qu’il a commis une grave erreur.

— Jetez un dime en l’air à vingt pas, et Maxine en fera de la petite monnaie, poursuit Raferty en regardant par-dessus l’épaule de Pitt. Chérie, annonce donc à monsieur Pitt où tu es.

  Un double cliquetis métallique répond à Raferty ; il est suivi d’un choc plus sourd.

— La cartouche qui vient de tomber sur le plancher devrait vous faire comprendre que la vieille winchester de Maxine est maintenant chargée et armée, explique Raferty. Vous ne le croyez pas ?

  Pitt se carre sur ses pieds et replie ses doigts sous le blouson.

— Ça ne prend pas, Lee.

— Alors, voyez par vous-même. Mais attention… pas de mouvement brusque.

  Pitt se retourne lentement pour faire face à Maxine Raferty, dont les bons yeux bleus le fixent au-dessus du cran de mire du fusil à répétition. Le canon est pointé, immobile comme une pierre, à la tête de Pitt.

— Désolé, monsieur Pitt, dit-elle tristement. Mais Lee et moi n’avons pas l’intention de passer le restant de nos jours en prison.

— Un crime de plus ne vous tirera pas d’affaire, dit Pitt. (Il bande ses muscles et jauge la distance qui le sépare de Maxine : environ 5 pieds.) J’ai amené des témoins.

— As-tu vu quelqu’un, chérie ? interroge Lee.

— II était tout seul sur la route, répond Maxine en secouant la tête. Et j’ai continué de guetter après son arrivée dans la maison. Personne ne le suivait.

— Je m’en doutais, dit Lee Raferty en soupirant. Vous bluffez, monsieur Pitt. Si vous aviez la moindre preuve palpable contre Maxine et moi, vous seriez venu avec le shérif.

— C’est bien ce que j’ai fait, vous avez raison, fit Pitt en souriant d’un air détaché. Il attend dans sa voiture à un demi-mile d’ici, et deux de ses assistants entendent nos moindres paroles.

— Maudit bâtard, vous mentez ! lance Raferty crispé.

— Il a fixé un micro sur ma poitrine, explique Pitt en défaisant le bouton de son col de chemise. Exactement ici, sous ma…

  Maxine abaisse son fusil de quelques millimètres, mais Pitt s’est jeté de côté et presse la détente du colt que cachait son blouson.

  La winchester et le colt paraissent tonner au même instant.

 

  Al Giordino et Abe Steiger sont arrivés quelques minutes avant Pitt, et ils se sont couchés derrière un bouquet de sapins bleus. A la jumelle, Steiger observe Maxine qui étend son linge.

— Vous apercevez le mari ? demande Giordino.

— Il doit être à l’intérieur. (La jumelle bouge lentement dans les mains de Steiger.) Ah ! Pitt arrive maintenant près d’elle.

— Son colt 45 doit se voir comme s’il avait un troisième bras.

— Non, il l’a recouvert avec son blouson. (Steiger abaisse une branche pour avoir le champ libre.) Pitt entre maintenant dans la maison.

— C’est le moment de se rapprocher, dit Giordino, et il est en train de se mettre à genoux lorsque le bras de Steiger l’écrase sur le sol.

— Bougez pas ! La vieille s’attarde pour voir s’il était suivi.

  Ils demeurent muets et immobiles plusieurs minutes pendant que Maxine fait le tour de l’enclos en surveillant les arbres environnants. Après un dernier regard à la route, elle disparaît derrière le coin de la maison et hors de la vue de Steiger.

— Laissez-moi le temps d’arriver derrière avant de vous présenter à la porte d’entrée, dit Steiger.

— Prenez bien garde aux ours, dit Giordino en hochant le menton.

  Steiger lui adresse un sourire pincé et se glisse dans un petit ravin. Il est encore à près de 50 mètres de son objectif lorsqu’il entend les coups de feu.

  Giordino prenait tout son temps, lorsque l’explosion fait trembler les fenêtres. Il bondit sur ses pieds, descend à toute allure la butte et saute par-dessus la barrière de la cour. Au même moment, Maxine Raferty recule à travers la porte d’entrée comme un tank sans conducteur, dégringole les marches du porche et s’effondre. Giordino s’arrête dans sa course, surpris de voir la robe couverte de sang. Il reste figé pendant que la vieille femme se remet sur pied avec une agilité d’acrobate. Et il est trop tard lorsque Giordino remarque qu’elle tient dans sa main une sorte de vieille carabine.

  Maxine, prête à foncer dans la maison, voit Giordino planté bêtement dans la cour. Elle saisit tant bien que mal sa winchester, une main sous la culasse, l’autre sur le canon, et elle tire de la hanche.

  L’impact de la balle fait faire à Giordino un demi-tour en l’air avant de le coucher dans l’herbe : sa cuisse gauche laisse échapper un geyser de sang à travers son pantalon déchiré.

  Pour Pitt, tout semble s’être déroulé au ralenti. La gueule de la winchester lui crache sa flamme devant les yeux. Il pense d’abord qu’il a été touché mais, couché sur le plancher, il constate qu’il peut encore remuer bras et jambes. La balle de Maxine lui a déchiré l’oreille et celle de son colt a fracassé la crosse de la winchester, et, par ricochet, l’abat-jour de verre d’une vieille lampe à pétrole.

  Lee Raferty rugit comme une bête et cogne avec son tuyau. Le coup heurte l’épaule de Pitt et l’atteint au crâne. Il gémit de douleur et frappe au hasard ; un voile noir s’étend devant ses yeux, et il fait des efforts désespérés pour y voir plus clair. Il pointe son colt sur l’ombre vague de Lee.

  Maxine abat le canon de sa carabine sur le colt qu’elle arrache aux doigts de Pitt et qui vole au fond de la cheminée.

  Maxine s’efforce d’armer sa carabine sans crosse ; Lee avance, brandissant son morceau de plomberie. Pitt lève le bras pour parer le coup, et il s’étonne de ne pas entendre l’os se briser. D’un coup de pied il touche Lee au genou, et le vieil épouvantail s’effondre sur lui.

— Tire, bon Dieu ! crie Lee à sa femme. Tire !

— Je ne peux pas, crie-t-elle, tu es devant.

  Lee abandonne son tuyau et se débat férocement pour se dégager, mais Pitt le tient par le cou de son bras valide et ne le lâche pas. Maxine tourne autour d’eux, carabine pointée, essayant vainement de tirer sans atteindre son mari. Pitt le tient toujours, se sert de lui comme d’un bouclier et essaie de se relever. Soudain, Lee pivote, donne un coup de genou dans le ventre de Pitt et lui échappe.

  Dans un brouillard de souffrance, Pitt réussit à saisir la lampe à pétrole et il la lance. La lampe s’écrase contre la poitrine de la femme qui hurle ; les morceaux de verre déchirent sa robe et lui tailladent un sein. Pitt fonce de tout son poids : le coup de tête est le plus violent qu’il ait jamais donné de sa vie. Pour une femme de son âge, Maxine est solide, mais elle n’est tout de même pas de taille à résister à un pareil coup de boutoir. Elle vole avec tant de force qu’elle traverse la porte d’entrée et disparaît.

— Espèce de salaud ! hurle Lee.

  Il bondit à la cheminée, y ramasse le colt dans les cendres et se retourne vers Pitt.

  Une fenêtre se volatilise d’un coup : Abe Steiger tombe dans la cuisine en écrasant sous son poids une table. Lee se détourne. Pitt en profite pour ramasser le tube de plomb qu’il abat sur la tempe du vieil homme. Steiger, encore ahuri, n’oubliera jamais le bruit écœurant du tuyau fracassant la boîte crânienne.

  Giordino est sur le sol ; ébahi, il regarde sa jambe blessée. Il lève les yeux sur Maxine sans comprendre encore exactement ce qui s’est passé. Puis, bouche bée, impuissant, il voit la femme éjecter posément l’étui vide et armer sa carabine. Maxine ajuste, vise soigneusement la poitrine et pose le doigt sur la détente.

  La détonation est assourdissante, la balle défonce le sternum et catapulte un affreux mélange de sang, d’os et de moelle aux pieds de Giordino. Maxine demeure inerte deux ou trois secondes avant de s’effondrer mollement dans la cour en une masse grotesque, le sang coulant à flots de sa poitrine et rougissant l’herbe.

  Pitt se penche par-dessus la balustrade du porche, le colt à la main, le canon pointé. Il baisse son arme et avance à pas raides vers Giordino. Steiger sort pour voir ce qui se passe ; il devient livide et vomit dans un massif de fleurs.

  Giordino ne quitte pas des yeux un luisant morceau de cartilage blanc. Pitt s’agenouille près de lui.

— Tu… tu as fracassé la poitrine de cette brave vieille ? demande Giordino.

— Oui, répondit Pitt, pas tellement fier.

— Dieu merci, soupire Giordino en pointant le doigt. Je pensais que ce machin-là était à moi.

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